Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
ma vie
3 septembre 2007

Données épidémiologiques hyperactivité

Hypothèses étiopathogéniques

Comme le relèvent les rédacteurs de la cim 10, la terminologie et les critères du dsm impliquent l’hypothèse étiopathogénique d’une anomalie d’ordre neurobiologique. En fait, les hypothèses avancées sont multiples (Vallée, 1996) :

  • dysfonctionnement des systèmes dopaminergiques, suggéré par le rapprochement avec d’autres pathologies (encéphalite de Von Economo, chorée de Sydenham) et surtout par l’effet des amphétamines (qui ont un effet pharmacologique de stimulation de ces systèmes) ;
  • dysfonctionnement des structures cérébrales assurant la sélectivité et le maintien de l’attention (système thalamo-frontal) ; l’hyperactivité motrice n’étant qu’une conséquence.

Il faut rappeler, cependant, que les études neurophysiologiques n’ont pas apporté de résultats concordants et que la démonstration directe de telles anomalies reste à faire (Rund et coll., 1998 ; Pearson et coll., 1996 ; Losier et coll., 1996). Il n’y a pas non plus de preuves directes du dysfonctionnement dopaminergique suggéré par l’action thérapeutique des psychostimulants.

Les traitements proposés

Si une chose paraît incontestable, c’est l’efficacité à court terme des psychostimulants dérivés de l’amphétamine sur l’agitation motrice et comportementale des enfants rassemblés sous l’étiquette du syndrome hyperkinétique. L’action sur les troubles de l’attention est moins évidente.

L’effet positif de l’amphétamine sur les troubles du comportement de l’enfant, signalé dès 1937 par Bradley, a été depuis largement confirmé par un grand nombre d’études : Swanson et coll., en 1993, dénombraient plus de 3 000 publications sur ce thème. La méta-analyse de 161 études contrôlées contre placebo, portant sur des populations allant de l’âge de la maternelle à l’âge adulte, conclut à une amélioration chez 95 à 75 % des 5 899 patients traités par psychostimulants contre 4 à 30 % avec le placebo (Spencer et coll., 1996).

Dans l’ensemble des données publiées, les effets secondaires à court et à long termes semblent relativement peu importants : notamment la notion classique de troubles de la croissance a été récemment rediscutée. Également discuté à plusieurs reprises, le risque de toxicomanie ultérieure n’a jamais été clairement démontré.

La cause pourrait donc paraître entendue ; les psychostimulants constituent un traitement efficace et peu dangereux : que demander de plus ?

Pourtant aux États-Unis même, la publication récente d’études montrant l’augmentation considérable, au cours des dix dernières années, de la prescription des psychotropes et notamment des psychostimulants chez l’enfant, a provoqué un débat dans le monde médical et dans l’opinion publique.

Selon ces enquêtes, le nombre d’enfants et d’adolescents traités par le méthylphénidate a été multiplié par 2,5 entre 1990 et 1995 atteignant près de 3 % de l’ensemble de la population américaine âgée de 5 à 18 ans (Goldman et coll., 1998). Parallèlement, on sait que la production de ce médicament aux États-Unis est passée de moins de 2 tonnes en 1986 à 9 tonnes en 1995 et qu’elle a triplé entre 1990 et 1995 ; parallèlement la production d’amphétamines est passée de 0,4 à 1 tonne pendant la même période (Goldman et coll., 1998).

D’autres données révèlent qu’un grand nombre des cas traités par les psychostimulants ne correspondent pas strictement aux critères diagnostiques du thada, et s’écartent donc des conditions dans lesquelles l’efficacité de ces traitements a été établie (Jensen et coll., 1989 ; Wolraich et coll., 1990 ; Angold et coll., 2000). Ainsi, dans l’étude d’Angold qui porte sur un échantillon de 4 500 enfants et adolescents âgés de 9 à 13 ans, 7,3 % ont reçu des psychostimulants, alors que seulement 3,4 % remplissent les critères dsm III-R.

Ces enquêtes montrent aussi un abaissement de l’âge auquel ces traitements sont débutés : la consommation de psychostimulants et d’autres psychotropes a été multipliée par 2 à 3 entre 1991 et 1995 chez les enfants de 2 à 4 ans. Parmi les autres produits prescrits chez ces enfants, il faut noter la forte augmentation des antidépresseurs et de la Clonidine (Zito et coll., 2000).

Les auteurs de ces recherches mettent en cause les prescriptions des généralistes ou des pédiatres nord-américains, qui ne tiennent pas suffisamment compte des critères diagnostiques et des recommandations officielles en faveur d’autres approches thérapeutiques et éducatives.

En conclusion

Il paraît évident que les critères des classifications rassemblent, sous les termes trouble hyperkinétique ou trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité, des cas hétérogènes. Il faut tout particulièrement souligner l’incertitude qui persiste quant aux limites de ce syndrome avec les variations de la normale, surtout chez les enfants les plus jeunes, et aussi quant aux cas manifestement très nombreux dans lesquels une agitation instable vient en fait traduire des troubles psychopathologiques relevant de mesures thérapeutiques spécifiques.

Le clinicien ne saurait se contenter d’une réponse positive à un certain nombre de critères, dont l’évaluation d’ailleurs n’exclut pas la subjectivité de l’informateur. Il est indispensable – y compris pour utiliser correctement le dsm IV – que le clinicien ait une connaissance approfondie du développement normal de l’enfant, et qu’il ait une expérience étendue de l’ensemble de la pathologie psychiatrique de l’enfant pour pouvoir éliminer les diagnostics différentiels, sur lesquels insistent le dsm IV comme la cim 10.

Même dans les cas où l’hyperactivité avec troubles de l’attention constitue l’essentiel des difficultés de l’enfant, tous les auteurs – y compris anglo-saxons –, s’accordent sur l’intérêt d’autres mesures thérapeutiques (thérapies psychomotrices, accompagnement psychopédagogique, orthophonie ou psychothérapie).

Les psychostimulants sont certainement des médicaments efficaces, dont l’emploi est justifié pour des formes d’hyperactivité invalidante, dans lesquelles les autres mesures thérapeutiques ont échoué. Raison de plus pour ne pas les discréditer par un usage abusif, résultant d’une extension excessive de ce diagnostic.

En dépit du consensus actuel sur la plupart de ces points, les enquêtes récentes, ont révélé un décalage croissant aux États-Unis entre la réalité des pratiques de terrain d’une part, et d’autre part les recommandations officielles. Il en résulte une expansion considérable des prescriptions de psychotropes.

On est loin de cette situation en France. Mais l’exemple de ces dérives doit nous inciter à maintenir les règles strictes qui encadrent les prescriptions de psychostimulants dans notre pays.

Publicité
Publicité
Commentaires
ma vie
Publicité
Publicité